Le principe du puits canadien
L’histoire du développement du puits en France
Le puits canadien « traditionnel » associé à un procédé de ventilation naturelle
On trouve quelques exemples de stratégies de préchauffage/rafraîchissement traditionnelles utilisant l’inertie thermique de la terre sur des bâtiments traditionnels, dans tous les climats.
Il existe de nombreux principes de fonctionnement de puits canadiens selon le climat et l’architecture du projet. Nous avons choisi de nous concentrer sur les puits canadiens récents, issus des problématiques climatiques locales.
Le puits canadien associé aux démarches de constructions basse énergie
Le puits canadien est d’abord réapparu dans les pays germanophones et scandinaves sur les premières constructions à basse consommation d’énergie, pour lesquels les fabricants de ventilateurs ont été sollicités pour concevoir des systèmes adaptés à la démarche. Les parois des maisons sont surisolées et l’étanchéité à l’air parfaitement réalisée, la ventilation est repensée pour qu’elle puisse assurer un renouvellement sanitaire confortable, mais sans avoir d’impacts sur les consommations de chauffage.
Les systèmes de ventilation à double flux représentent cette première évolution, ils remplacent la ventilation naturelle par tirage thermique. Le rendement de l’échangeur de chaleur est déterminant, les technologies actuelles permettent de récupérer 90% de la chaleur de l’air extrait. Au lieu d’insuffler de l’air à température extérieure, l’air pénètre dans la maison à 18°C. La mise en œuvre de cette démarche permet de réduire considérablement les besoins de chauffage.
La deuxième démarche aura été de réduire la consommation d’électricité des ventilateurs (modèles à courant continu), et la consommation de la batterie de protection antigel de l’échangeur à plaques de la VMC. A partir de 3°C, cette batterie se met en route pour relever la température de l’air pour éviter le givrage. Pour réduire ses consommations, on va utiliser l’inertie du sol et réaliser la prise d’air neuf à plusieurs dizaines de mètres linéaires de la maison. L’air passant dans le sol va gagner quelques degrés avant d’arriver dans la VMC et ainsi, la batterie n’est plus utile.
La question du confort d’été dans ces pays a toujours été secondaire, puisque la contrainte climatique estivale n’est pas très forte. Le puits canadien associé à une VMC double flux permet de répondre au confort d’été. Il suffit pour cela de by-passer l’échangeur de chaleur de la VMC en été.
Ainsi, de nombreuses installations comprenant des échangeurs d’airs géothermiques ont vu le jour depuis une vingtaine d’années sur des maisons neuves et des rénovations lourdes, qui ont permis le développement de collecteurs de puits canadien adaptés à cet usage. Le puits canadien n’est ici qu’un ajout au système de ventilation à double flux qui permet d’augmenter le rendement global de l’installation, et d’apporter un petit rafraîchissement. A l’heure actuelle, le puits canadien à air est souvent remplacé par un puits canadien à eau glycolée (SEWT).
L’intégration au marché français
Malgré la faible distance qui sépare la France de ses voisins suisses et allemands, il existe une différence d’approche importante entre les standards de constructions réglementaires français et les démarches basse énergie initiées depuis deux décennies en Europe.
Pendant que les allemands migraient de la ventilation naturelle à la VMC double flux, en France la VMC simple flux autoréglable se généralise sur le marché de la maison neuve, dont l’évolution aura été la VMC simple flux hygroréglable au milieu des années 2000. Ces systèmes relativement peu coûteux et simples à mettre en œuvre permettront à une profession non spécialisée de la proposer. Ainsi, encore aujourd’hui, il n’existe pas de métier artisanal spécifique à la ventilation en France, l’électricien comme le plombier peuvent le proposer mais aucun n’en a fait sa spécialité.
De ce fait, peu de fabricants de VMC performantes ont cherché à distribuer ses systèmes sur le marché français. La différence de coût d’investissement, l’absence de professionnels et d’intérêt manifesté par le public français sont en cause. Ce n’est que maintenant que les fabricants de VMC mettent sur le marché des VMC haut rendement, et s’intéressent aux puits canadiens, couplés à une ventilation double flux.Depuis peu, la combinaison d’une hausse du prix des énergies fossiles et la canicule de 2003 aura fait naitre une demande, essentiellement exprimée par le particulier en recherche d’une solution pour augmenter le confort de son projet de construction, et de collectivités ou d’entreprises en recherche de solutions innovantes sur des projets conséquents. Le développement est essentiellement dû aux auto constructeurs, qui vont s’inspirer des techniques traditionnelles ou des réalisations outre-Rhin et faire le pari du puits canadien sur leur projet.
Cet engouement n’est pas tout de suite suivi par les constructeurs de maisons qui voient l’innovation avec scepticisme, craignent le développement de problèmes sanitaires et refusent ou dissuadent leurs clients de réaliser un puits canadien. Les professionnels habitués aux « traditionnelles » VMC sont également frileux car n’ont aucune idée des conduits à utiliser et prescriptions de mise en œuvre à suivre pour faire un réseau puits canadien ou VMC double flux haut rendement.
En 2005, les fabricants de ventilateurs présents en France sont pour la plupart au même point, et refusent de garantir le fonctionnement de leurs VMC à partir de puits canadien.
Les premières réalisations de particuliers pionniers sont donc courageuses puisque réalisées sans informations précises et fiables. La mise en ligne des expériences sur Internet permet une explosion de la demande en très peu de temps, et la multiplication des réalisations dans tous les climats français.
Du fait de la demande, il est possible de trouver des solutions puits canadien en France, tous les produits sont issus des réflexions « maisons basse énergie » Outre- Rhin.
Fondamentaux pour le dimensionnement d’un puits canadien
La terre à deux mètres de profondeur, a une température pratiquement constante tout au long de l’année, elle varie entre 10 et 18°C selon les saisons alors que l’air extérieur peut varier de -5°C à +35°C dans la plupart des climats français. Un puits canadien va exploiter cette température constante : l’air, au lieu d’être amené directement de l’extérieur, va circuler dans un collecteur enterré au contact avec le sol pour en échanger ses calories. L’objectif étant que l’air à la sortie du collecteur soit à la température du sol. Le collecteur est soit à air et on parle de puits canadien (LEWT), soit à eau et l’on parle d’échangeur d’air géothermique à eau glycolée (SEWT).Le collecteur géothermique est un tube au contact direct avec le sol. L’échange de chaleur s’opère par conduction du sol vers le tube, et par convection du tube vers l’air qui transite. Les dimensionnements de puits sont donc fonction à la fois des conditions de ventilation souhaitées dans le bâtiment, et de la capacité thermique du sol.
Plusieurs notions de dimensionnement apparaissent :
Le temps nécessaire pour que l’air se réchauffe au contact du sol : cela dépend de la longueur du collecteur, son diamètre, la conductivité thermique du sol
Le temps pendant lequel le sol peut réchauffer l’air avant de se refroidir : cela dépend de la capacité thermique, masse volumique du sol, profondeur d’enfouissement du collecteur
La saisonnalité qui permet au puits canadien de réchauffer/refroidir le sol en fonction des saisons, transformant le sol en volume tampon : un puits fonctionnant uniquement en été épuisera plus rapidement le sol qu’un puits tournant hiver et été
La température potentielle recherchée : cela dépend de la profondeur d’enfouissement
La qualité de l’échange géothermique dépend des constituants du sol, et de leur teneur en eau qui fait fortement varier leurs caractéristiques. Il convient donc de regarder les données sur les constituants : la masse volumique, la capacité thermique, et la conductivité thermique des couches de sol. On parle ici à la fois du sol qui servira de remblai, et du matériau d’enrobage s’il est différent.
Si un mauvais sol n’invalide pas la pertinence de réaliser un puits canadien, cela peut impliquer de devoir ajouter quelques mètres linéaires de collecteur pour compenser.
Principe :
Une forte capacité thermique/masse volumique indique un sol ayant la capacité de transmettre une importante quantité de chaleur. Il permettra de conserver une bonne qualité d’échange au fil de la saison.
Une forte conductivité thermique est indispensable pour que les calories du sol soient échangées avec le collecteur.
Le matériau constituant le collecteur influe peu sur le résultat obtenu, sauf lorsqu’il s’agit d’un matériau très isolant (lambda de 0.05 W/m.K). Les différences autrement sont de l’ordre du centième de degré entre les différents types de collecteurs géothermiques.
Paramètres environnementaux qui influencent l’échange :
La proximité d’un bâtiment + (surtout s’il est mal isolé et sur terre plein)
L’exposition au vent du sol +++
La nature de la surface du sol (absorptivité) ++ (un sol de couleur noire, comme du bitume absorbe nettement plus de chaleur qu’un sol blanc
Le rayonnement solaire à la surface du sol ++ (et donc l’ombrage sur le sol)
L’humidité à la surface du sol + (surtout valable pour les sols perméables, si le constituant principal du sol a une conductivité variant fortement en fonction de la teneur en eau (sable par exemple)
Quelles performances en hiver ?
Dans n’importe quel bâtiment, le fait de ventiler conduit à des dépenses d’énergie (voir plus haut). Le puits canadien va remplacer les grilles d’aération en menuiseries et amener par le biais d’un réseau de gaines connecté au collecteur enterré un air plus chaud que l’air extérieur. L’amenée d’air dans la maison est généralement mécanique, par le biais d’un ventilateur. Il permet de diminuer l’impact de la ventilation sur les consommations de chauffage.Les économies sont fonction des caractéristiques des maisons (bâti ancien ou pavillon neuf ou récent) et du mode de diffusion de la chaleur (convection ou rayonnement). Le puits canadien va avoir une consommation électrique dérisoire et récupère en moyenne 10 fois plus d’énergie qu’il n’en consomme. Toutefois, son intérêt est variable selon la localisation climatique du projet :
- Dans les climats méditerranéens, océaniques et semi-continentaux, les températures extérieures restent souvent clémentes en hiver. Le différentiel température du sol – température de l’air extérieur est rarement supérieur à 10°C. Le puits n’est donc pas obligatoirement une solution pertinente pour le préchauffage. Si le système de chauffage est convectif ou si l’objectif est de mettre hors gel une maison secondaire, le puits canadien pourra toutefois diminuer sensiblement la puissance et la consommation de l’équipement de chauffage.
- Dans des climats continentaux, le différentiel température du sol – température de l’air extérieur est souvent supérieur à 10°C. Un système de ventilation efficace est donc une nécessité. Le puits canadien peut être couplé à une VMC double flux pour réduire l’impact de la ventilation sur les consommations énergétiques. Le puits canadien servira à monter la température en amont du ventilateur pour éviter le givrage de l’échangeur de chaleur
Thème | Confort et qualité de l’air | Performances | Système de chauffage : préchauffer, répartir la chaleur |
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Description | Le puits est ici une alternative à la VMC simple flux hygro. On y ajoute un puits canadien pour améliorer la qualité de l’air dans les pièces de vie (potentiellement mal ventilées si le bâtiment n’est pas étanche à l’air), et filtrer l’air extérieur pour limiter poussières et pollutions. | Le projet est une maison très isolée, la ventilation est effectuée par une VMC double flux. Le puits canadien sert d’entrée d’air à la VMC double flux, afin de préchauffer et éviter la formation de givre dans l’échangeur de chaleur, et augmenter le rendement global. | Le point de départ est la volonté de faire circuler la chaleur à partir d’une pièce chaude. Le puits canadien est muni d’un seul point de soufflage dans la pièce de vie, qui est en surpression, et l’air circule vers les chambres. Idem avec la serre, avec en plus un bypass pour la nuit. |
Problématique / Contexte |
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Solution possible | Puits canadien + VMC simple flux hygro
OU VMC double flux seule |
Puits canadien pour protéger VMC double flux (fonction antigel) de faible longueur (il suffit d’arriver à une température positive)
VMC double flux prioritaire, puits canadien n’est souvent pertinent que si il y a également un problème de confort d’été |
Puits canadien en ventilation cascade + VMR (extraction ponctuelle dans les pièces d’eau) |
Quelles performances en été ?
L’été, le puits sera dédié au rafraîchissement. L’insufflation d’un air à 20°C dans la maison permet de limiter l’élévation des températures et évite le recours à un système de climatisation. Le puits canadien est le seul moyen actif de ventilation permettant un rafraîchissement. Il n’est pas nécessaire de modifier l’installation pour qu’elle fonctionne correctement en été.
L’apport d’un puits canadien sur le confort thermique d’été est beaucoup plus difficile à prévoir que le même système utilisé en hiver (ou les gains en kWh sont facilement estimables avec de petits logiciels gratuits). Pour évaluer l’impact d’un puits, il faut commencer par évaluer le potentiel de surchauffe d’une pièce et les moyens existants pour traiter cette surchauffe (occultations, surventilation naturelle, etc…), cela nécessite des logiciels de simulation thermique : on analyse comment le bâtiment se comporte en fonction de son usage. Plus le bâtiment présente une surchauffe importante et plus cela se ressentira sur le dimensionnement du puits canadien, et sur l’installation de ventilation intérieure. En hiver, le taux est proche de 0,5 volumes/heure, si la maison surchauffe peu, cela sera tout à fait satisfaisant. Si la maison surchauffe beaucoup, ou spécifiquement pendant les périodes (rares) de canicule, il est nécessaire d’augmenter ce taux à 1 voire 2 volumes/heure. Mais encore faut il que le système de ventilation puisse assurer le débit souhaité.Thème | Pas de surchauffe | Surchauffe limitée | Surchauffe importante |
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Contexte | Typiquement, bâti ancien à forte inertie thermique, ou bâtiment situé dans une zone climatique clémente. | Les bâtiments basse consommation ont souvent tendance à vite surchauffer s’ils ne sont pas bien utilisés, même dans les zones climatiques clémentes. L’étude thermique permet d’analyser le risque de surchauffe. | Bâtiments en climat méditerranéen, bâtiments de bureaux ou la surchauffe vient des apports internes, bâtiments basse consommation mal conçus pour l’été (cela arrive trop souvent !) |
Problématique |
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Incidence | Dimensionnement 0.5 vol/h Soit autour de 30-50 ml de collecteur géothermique* |
Dimensionnement 1 vol/h dans pièces problématiques, 0.5 vol/h dans les autres Soit autour de 50 ml de collecteur géothermique* |
Dimensionnement 2 vol/h dans pièces problématiques, 0.5 vol/h dans les autres Soit autour de 75-100 ml de collecteur géothermique* |
*Dans le cadre d’une maison individuelle de 130m², avec un collecteur en polyéthylène de 175mm de diamètre.
- Dans les climats océaniques et continentaux, les températures extérieures restent souvent clémentes en été. Le différentiel température du sol – température de l’air extérieur est rarement supérieure à 10°C. Le puits n’est pas impératif car il existe des moyens passifs pour éviter la surchauffe du bâtiment. L’air arrivant par le puits canadien est tempéré mais il n’est pas nécessaire de prévoir une augmentation des taux de ventilation pour maintenir la maison confortable.
- Dans les climats méditerranéens, les températures extérieures sont souvent inconfortables en été. Le différentiel température du sol – température de l’air extérieur est souvent supérieur à 10°C. Il est difficile de maintenir une ambiance confortable sans puits canadien. L’air arrivant par le puits canadien est tempéré mais il est nécessaire de dimensionner le puits pour un fonctionnement de rafraîchissement, et de le combiner avec une sur ventilation nocturne.
Pour autant, le puits canadien n’est pas seulement une mini-climatisation, car il traite en partie le problème de la surchauffe des maisons qui est provoqué par … leur ventilation continue avec de l’air extérieur. Une maison constamment ventilée par un puits canadien voit ses courbes de température intérieure considérablement amorties par rapport à la même maison qui ventile 0.5 volumes/heures en journée caniculaire avec de l’air extérieur. Si les apports solaires des vitrages sont traités et les gains internes gérables, entre le matin et le soir, les pièces considérées prennent 2 ou 3°C au maximum.
Schéma simplifié et terminologie des équipements composant l’installation
Aujourd’hui, nous arrivons à modéliser assez finement le comportement thermique des bâtiments pour déterminer la nécessité de réaliser un puits canadien et le cas échéant de son dimensionnement. Cette approche amont renvoie au rôle fondamental de l’étude thermique : analyser le projet, identifier les défauts source d’inconfort et de moindre performance pour les corriger, trouver les meilleures solutions pour que les choix d’enveloppe et les systèmes énergétiques soient bien pensés, simples, et fonctionnels. Pendant une période il était assez fréquent que des puits canadiens soient équipés sur des bâtiments sans même que la question de la nécessité ait été posée en amont, à l’heure actuelle, on constate souvent une logique inverse : on ne pense pas aux puits canadiens alors qu’ils pourraient s’avérer pertinents (en tout cas de l’envisager).
En tant que solution intégrée, il est beaucoup plus facile de réaliser un puits canadien pendant les travaux de construction que de le rajouter ultérieurement lorsque le terrain est aménagé, et ou il est compliqué de rajouter des conduits de ventilation après coup. Il ne faut donc pas négliger cette étape de la conception de la maison, ou il est très facile d’évaluer l’impact des choix.
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