La pertinence économique des VMC double flux
Note de l’auteur : article écrit initialement en 2009, en cours de réécriture.
Voir également notre logiciel gratuit de calcul des gains d’une VMC double flux, récupérable sur fiabishop
VMC double flux : quels gains en attendre par rapport au simple flux ?
Comparons sur un projet étudié avec un logiciel de simulation dynamique, les écarts de consommation de chauffage selon le mode de ventilation.
Le rendement global de l’installation de VMC double flux est de 85%, la VMC double flux peut ici faire économiser jusqu’à 230 euros par an de dépense énergétique, par rapport à une VMC simple flux hygroréglable (si le chauffage est électrique).
Besoin de chauffage (en énergie utile – hors rendement système chauffage) |
Consommation électrique + protection antigel (en kWh Ef) |
Économie énergétique totale par rapport au cas 1 (en kWh Ef) |
|
---|---|---|---|
VMC simple flux autoréglable |
9054 kWh |
260 kWh |
+0 kWh |
VMC simple flux hygro A |
8120 kWh |
260 kWh |
-934 kWh |
VMC simple flux hygro A+puits canadien |
7322 kWh |
435 kWh |
-1557 kWh |
VMC double flux courants croisés (60%) |
7017 kWh |
700 kWh + 200 kWh (batterie de protection antigel ) |
-1397 kWh |
VMC double flux haut rendement (85%) |
6185 kWh |
525 kWh + 200 kWh (batterie de protection antigel ) |
-2404 kWh |
Quelques explications sur le tableau :
Nous parlons en énergie utile pour le besoin de chauffage, et pas en énergie finale ou énergie primaire pour éviter les biais dus aux rendements des systèmes de chauffage et aux vecteurs énergétiques. Nous caractérisons au départ la performance de l’enveloppe et visons à identifier les sources de déperditions de chaleur. L’intégration du système de chauffage permet d’obtenir la facture énergétique, qui est variable en fonction du rendement de l’appareil, et de l’énergie utilisée. L’intégration des facteurs de pondération en énergie primaire permet de situer le projet selon le Cep de la RT2005, mais la encore, celui ci dépend du type d’énergie utilisée pour le chauffage.
Nous parlons en énergie finale pour la consommation électrique de l’auxiliaire et pas en énergie primaire pour les mêmes raisons.
Notre calcul considère que le système simple flux hygroréglable permet une réduction du débit d’air thermiquement actif de 30% par rapport à son homologue simple flux autoréglable. Celui ci est variable en fonction de l’occupation réelle du bâtiment (plus l’occupation est continue et moins cette économie est importante).
La solution avec puits canadien consiste à substituer aux entrées d’air en menuiserie un puits canadien qui ici va produire une ventilation en cascade pour éviter la régulation complexe d’adaptation des débits d’extraction de la VMC aux débits d’insufflation du puits (voir dossier puits canadien). Si le puits dessert directement toutes les pièces et fonctionne toute l’année à partir d’un by pass automatique, la consommation électrique du puits passerait à 525 kWh (sur base ventilateur de 60W) et serait donc nettement plus pénalisante.
Les VMC double flux courant croisés correspondent aux anciennes technologies et modèles d’entrée de gamme, qui se caractérisent par un rendement moyen et une consommation électrique non négligeable.
Les VMC double flux haut rendement à 85% correspondent au matériel disposant d’un échangeur à contre courant. Certaines d’entre elles disposent d’un arrêt à partir d’une température négative, de la mise en route par courts cycles d’une batterie chaude pour condenser le givre de l’échangeur, d’une limitation du débit rentrant par rapport au débit sortant pour condenser le givre, d’un échangeur enthalpique ou d’un puits canadien.
le comparatif ne donne que des économies en kWh, pour visualiser le retour sur investissement, reprendre le comparatif en retour sur investissement plus haut.
La comparaison VMC simple flux / VMC double flux sur le BBC/RT2012
Dans la très bonne documentation « Réussir un projet de bâtiment basse consommation« , un diagramme présente la différence d’intérêt que peut avoir une VMC double flux selon que l’on construit en zone continentale ou méditerranéenne.
Si ce diagramme s’attache à montrer que les économies de fonctionnement sont variables alors que les coûts de fonctionnements sont fixes, il présente le biais de faire cette comparaison avec le coefficient Cep de la RT2005 (échelle de valeur en kWhep/m².an), et donc de montrer les économies de fonctionnement et les consommations d’auxiliaires vis à vis de cet indicateur.
Nous nous intéressons à ce diagramme car il reflète le discours dominant véhiculé par le BBC et depuis peu les textes de présentation de la RT 2012, à savoir que la solution privilégiée sur le bâtiment basse consommation est la VMC simple flux hygroréglable de type B, qui est la solution de référence dans tous les cas pour les maisons individuelles, quelque soit la zone climatique.
Cette comparaison envoie de facto aux oubliettes l’un des rôles de la VMC double flux qui peut permettre d’améliorer la diffusion de chaleur (dans le cas d’une installation d’un poêle, ou de maison passive chauffée via la ventilation, c’est un paramètre prépondérant vis à vis des économies intrinsèques de récupération de chaleur). Ce type de distinction s’apparente à un modèle qui distingue le système de chauffage et la ventilation, alors que les éléments sont liés, et les intérêts pas seulement dépendants de la note au Cep, coefficient pour le moins théorique.
La comparaison en énergie primaire ici utilisée n’indique pas quelle énergie est utilisée pour le chauffage. Comme cette économie de chauffage peut être pondérée d’une plage de 0.6 à 2.58, c’est une information essentielle en affichage.
Le moteur de calcul THCE de la RT2005 utilisé par le BBC Effinergie comptabilise très favorablement la VMC simple flux hygroréglable et sous estime d’une manière générale les besoins de chaleur. La méthode de calcul est donc un biais en elle même.
La consommation électrique de 11 kWhep/m².an pour la technologie double flux ne correspond pas à la valeur usuelle en maison individuelle (plutôt entre 4 et 6) mais celle d’un immeuble ventilé par un appareil centralisé. C’est un cas très particulier en soi. Cette consommation réelle est très largement améliorée avec les moteurs à commutation électronique que l’on retrouve sur les produits récents, et la possibilité de faire varier le débit en fonction d’une plage d’usage ou de capteurs (non considéré en RT2005).
Puisque l’idée est qu’au delà de la pertinence au calcul RT2005 de valider que le système présente un intérêt économique, utilisons une autre méthodologie plus adéquate, celle du retour sur investissement en comparant des solutions constructives. Et la, les résultats sont très différents.
VMC : investissement rentable ?
Il faut garder à l’esprit, lorsque l’on raisonne pertinence du double flux, qu’il faut considérer l’adéquation du mode de production de chaleur avec le système de ventilation. Les penser en même temps car la VMC peut être un moyen de véhiculer la chaleur, d’améliorer le fonctionnement du chauffage, améliorer le confort thermique, etc. On peut le raisonner ainsi : la VMC est un investissement économique uniquement dans la mesure où la logique est de faire une maison performante, et que cet investissement permette de réduire l’investissement vers le poste chauffage. En effet, dans les maisons classiques, on pense au système de chauffage avant de penser à la ventilation. Ce qui conduit à généraliser des solutions peu adaptées à la solution de chauffage.
Prenons deux exemples :
Une maison basse consommation équipée d’une pompe à chaleur Air/eau pour le chauffage et l’eau chaude, et d’un côté une VMC simple flux Hygro, de l’autre une VMC double flux haut de gamme. Cette approche permet de mesurer l’intérêt d’une vmc double flux lorsqu’elle ne sert qu’à limiter les déperditions de chaleur et améliorer le confort.
maison de 140m² shab |
Projet BBC |
Projet BBC |
||
---|---|---|---|---|
Investissement |
Choix système |
Investissement TTC |
Choix système |
Investissement TTC |
Chauffage |
PAC aérothermie |
19495 € |
PAC aérothermie |
19495 € |
ECS |
Idem chauffage |
0 € |
Idem chauffage |
0 € |
Ventilation |
Double flux haut de gamme + réseaux qualité |
8731 € |
Simple flux Hygro A |
1076 € |
Subventions |
CI |
-4000 € |
CI |
-4000 € |
24226 € |
16571 € |
En matière d’investissement, la VMC double flux apporte un surcoût « systèmes » par rapport à la solution VMC simple flux hygro, d’autant que le double flux ne rentre pas dans les crédits d’impôts « systèmes ».
maison de 140m² shab |
Projet BBC |
Projet BBC |
||
---|---|---|---|---|
Fonctionnement |
Choix système |
Fonctionnement € TTC/an |
Choix système |
Fonctionnement € TTC/an |
Chauffage |
PAC aérothermie |
178 € |
PAC aérothermie |
229 € |
ECS |
Idem chauffage |
212 € |
Idem chauffage |
212 € |
Auxiliaires |
Double flux haut de gamme + réseaux qualité |
48 € |
Simple flux Hygro A |
28 € |
Entretien et maintenance |
150 € |
110 € |
||
Abonnements |
205 € |
205 € |
En fonctionnement, la solution avec VMC double flux réduit la dépense énergétique pour le chauffage, coûte un peu plus cher en consommation électrique, et présente un entretien plus élevé (filtres à changer).
Ici, la mise en place d’une VMC double flux ne se traduit pas par un retour sur investissement, puisque les surcoûts « cachés » pondèrent les économies attendues. C’est un sur investissement qui peut trouver un intérêt de par le confort thermique supérieur et une meilleure qualité d’air (il ne faut pas raisonner que par les économies financières), mais il est peu probable qu’il soit rentabilisé un jour.
Deuxième exemple :
Reprenons notre maison basse consommation équipée d’une pompe à chaleur Air/eau pour le chauffage et l’eau chaude, et une VMC simple flux Hygro, et de l’autre remplaçons la PAC par un poêle à bois pour le chauffage, également raccordé à un ballon solaire pour la production d’eau chaude, et une VMC double flux haut de gamme. La VMC double flux ici est un équipement indispensable au projet : sans elle, il faudrait disposer d’appoints dans les pièces éloignées.
maison de 140m² shab |
Projet BBC |
Projet BBC |
||
---|---|---|---|---|
Investissement |
Choix système |
Investissement TTC |
Choix système |
Investissement TTC |
Chauffage |
Poêle bois |
5980 € |
PAC aérothermie |
19495 € |
ECS |
CESI + set hydro pour le poêle |
8133 € |
Idem chauffage |
0 € |
Ventilation |
Double flux haut de gamme + réseaux qualité |
8731 € |
Simple flux Hygro A |
1076 € |
Subventions |
CI |
-5000 € |
CI |
-4000 € |
17844 € |
16571 € |
La solution globale, en matière d’investissement est proche de la solution comparée. Nous avons pris ici pour tous les appareils (poêle + solaire + vmc double flux) des prix « haut de gamme ».
maison de 140m² shab |
Projet BBC |
Projet BBC |
||
---|---|---|---|---|
Fonctionnement |
Choix système |
Fonctionnement € TTC/an |
Choix système |
Fonctionnement € TTC/an |
Chauffage |
Poêle bois |
290 € |
PAC aerothermie |
229 € |
ECS |
CESI + set hydro pour le poêle |
53 € |
Idem chauffage |
212 € |
Auxiliaires |
Double flux haut de gamme + réseaux qualité |
48 € |
Simple flux Hygro A |
28 € |
Entretien et maintenance |
110 € |
110 € |
||
Abonnements |
97 € |
205 € |
En fonctionnement, la solution avec VMC double flux présente un coût énergétique un peu plus élevé pour le chauffage (du fait du rendement du poêle ainsi que des coefficients de variation spatiale et temporelle), est de loin la plus efficace pour l’eau chaude, coûte un peu plus cher en consommation électrique, et présente un entretien équivalent (filtres à changer+entretien du poêle).
Ici, la mise en place d’une VMC double flux se traduit par un retour sur investissement très rapide, puisque la solution globale « chauffage+ventilation » présente des coûts d’investissement proches et des coûts de fonctionnements globaux largement inférieurs. En considérant une augmentation du coût d’achat de l’électricité faible (+2.5% par an) et (+1% par an) pour le bois, les courbes s’éloignent progressivement et présentent des différences significatives sur le long terme.
L’exemple ici témoigne de l’intérêt de disposer d’un moyen efficace pour la production d’eau chaude sanitaire. Toutefois, si l’ensemble « solaire+poêle » était remplacé par un ballon thermodynamique, le moindre coût d’investissement de l’ensemble situerait la solution « poêle + VMC double flux » moins onéreuse que la PAC (donc cela n’invalide pas la démonstration, au contraire).
Pour conclure :Parler de « retour sur investissement » sur l’équipement ventilation double flux est impossible, puisque les économies générées par l’équipement sont variables selon le prix d’achat de l’énergie (Vous économisez des kWh en chauffage mais selon que vous achetez cette énergie 0.04 euros/kWh ou 0.11 euros/kWh, vous avez un temps de retour variable).
C’est aussi un mauvais débat, car sans lui associer la solution de chauffage, on ne tient pas compte des économies d’investissement possibles sur la diffusion de chaleur, ou sur la réduction de puissance des équipements de chauffe, alors que ces économies sont possibles et souhaitables.
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